Mon humanité est collée à ma pédagogie

 En traversant la porte d’entrée de la classe de 4ème, je reviens dans mes souvenirs au début de ma carrière lorsque je donnais des cours dans la banlieue de ma ville natale. Que ce soit la première fois ou la dernière, je constate que l’expérience est toujours la même : sur mes épaules, je porte mes bagages d’émotions d’enfance, les aventures d’adolescence et les décisions de ma jeunesse. Mes mains ne sont pas vides, au contraire, elles sont remplies de moments lumineux et d’autres plus opaques.

Dans le contact quotidien avec mes élèves je suis appelé à être celui qui connaît sa matière, un dictionnaire ambulant, un cahier ouvert pour recevoir leurs questions ou agir en tant que plateforme d’Internet pour savoir répondre aux mille et une informations qu’ils me demanderont.

Mais, au-delà des contenus de ma discipline, je dois aussi être prêt à recevoir leurs humanités qui se construisent jour après jour, parce que derrière leurs questions ou leurs silences, il y a aussi une personne, une histoire, une culture et une vie qui cherche à s’envoler.

Il est difficile de détacher de mon rôle de professeur celui de l’adulte que je suis. Dans la transmission de la culture, collée à ma pédagogie, j’ai ma propre humanité, celle qui se construit avec les années. Je reçois la vitalité des élèves et leur énergie, parfois incontrôlable et d’autres fois pleine de bonnes intentions. Je dois aussi distribuer des félicitations, des encouragements et parfois des conseils. Je suis appelé à être créatif pour que la routine de travail ne sèche pas la soif d’apprendre. D’autres fois, mon attention est convoquée pour offrir des activités attractives ou donner la parole pour qu’ils deviennent protagonistes. Et quand l’agitation gagne du terrain et le bruit de la salle monte d’un cran, je dois trouver les mots et les gestes précis pour retrouver le calme.

Dans les salles de classe, la vie se manifeste parfois par la colère, le refus de travailler, l’opposition à l’autorité, le manque de respect ou même l’agressivité. Ce sont des expériences qui prouvent à chaque instant ma capacité de gérer l’ambiance de la classe et mon autorité. Dans ces circonstances, les élèves chahuteurs m’interpellent et je dois leur prêter mon attention, mon regard et ma patience. Ma première réaction est la menace. Je reconnais que ce dispositif, très souvent employé en éducation, peut-être utile pour appeler à l’ordre, mais à condition que la relation d’autorité soit établie correctement. Dans d’autres moments, la menace n’a aucune efficacité. Je découvre des élèves en difficultés, des vies brisées par les événements et qui crient devant moi le manque d’amour et de confiance en eux.

À plusieurs reprises, je me laisse déstabiliser par ces élèves qui appellent aux secours. Mon combat est de résister à la tentation de recourir à la menace, ce bouclier qui pourrait m’épargner des ennuis. C’est une tâche qui m’épuise. Dans ces moments, je contrôle ma respiration, j’essaie d’établir un contact visuel net, je maîtrise mes mots pour qu’ils retrouvent la paix et le bon sens. C’est avec douleur que je découvre, parfois, une intériorité trop endommagée et en rage contre la vie.

Je finis mes leçons et je repars chez moi. Sur le chemin de retour, je repasse ma journée, les activités réussies et ce que je dois retravailler. Je porte aussi les visages et les prénoms de ceux et celles qui m’ont transmis un souffle de vie, une émotion ou un mot de gentillesse. Je les garde comme un trésor, comme une invitation à revenir le lendemain pour en trouver d’autres. Et de cette manière je nourris ma vie d’enseignant, celle de tous les jours, avec passion.

Comentarios

  1. Muy hermoso Rolando Te deseo mucho éxito en tu hermosa labor pedagógica Muchos cariños

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